[DMA] Chapitre 1 : "Montre-moi ces autres vies que je ne sais pas"

 Au cas où vous ne l'auriez pas vu, je remets ici l'avertissement posté en tête de rubrique, avec des précisions supplémentaires  : 

/!\ AVERTISSEMENT /!\

Certaines thématiques de cette nouvelle seront extrêmement dérangeantes (viol, inceste, prostitution, drogue, violence) et seront clairement abordées, pas juste suggérées. Donc, si vous êtes trop sensible, je vous déconseille très fortement de lire cette histoire. Par ailleurs, si vous avez été vous-même victime de ce genre de situation, certains passages pourraient raviver douloureusement votre vécu... Donc à vous de voir si vous souhaitez toujours continuer la lecture !

Autre précision : Célian emploiera parfois des mots très crus et très vulgaires et aura un comportement inapproprié pour un enfant de son âge. Vous en comprendrez les raisons au fur et à mesure...

Pour finir, et avant que vous vous posiez la question : je n'ai pas vécu personnellement les épreuves de Célian, mais c'est une chanson qui m'a inspiré son personnage il y a maintenant plus de 10 ans, même si je n'y serai pas totalement fidèle. Aussi, j'espère que je ne me montrerai pas maladroite dans ma façon d'aborder certains sujets. Je présente à l'avance mes excuses si ma maladresse  blesse involontairement certains lecteurs.

 

 

 

[DMA] "Montre-moi ces autres vies que je ne sais pas"

J'ai le vice dans le sang.

C'est Mme Yamamoto qui avait finalement raison.

Car oui, j'ai le vice dans le sang. 

[DMA] "Montre-moi ces autres vies que je ne sais pas"

Quand j'avais entendu cette femme mettre en garde Mme Berry sur les fréquentations de son fils Arden, je l'avais haïe, abreuvée dans ma tête de toutes les insultes que je connaissais, et, à dix ans, j'en connaissais déjà un paquet. Je me souviens encore parfaitement de ses mots, marqués au fer rouge dans ma chair, malgré les années qui se sont écoulées.

[DMA] "Montre-moi ces autres vies que je ne sais pas"

« Vous ne devriez pas laisser le petit Malzac entrer chez vous ! Sa famille, c'est voleur et compagnie. Saviez-vous que son père est en prison ? Si vous voulez mon avis, le fils aîné ne devrait pas tarder à l'y rejoindre, à force de traficoter dieu sait quoi ! Quant à sa mère, je préfère vous taire la manière dont elle met du beurre dans les épinards... Ces gens-là, ils ont le vice dans le sang !

— Célian n'est qu'un enfant, avait protesté la mère de mon ami — de mon seul ami.

— Un enfant qui dessine des trucs pornographiques en classe !

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— Pardon ?

— C'est sa maîtresse qui en a parlé à Mme Moreau qui m'en a parlé !

— Déjà je ne pense pas que la maîtresse aurait dû en parler à une tierce personne, ensuite, si cette histoire est vraie, peut-être est-ce une manière pour Célian d'attirer l'attention, d'appeler à l'aide ? En tout cas, il a toujours été adorable à la maison, et les dessins qu'il nous fait sont toujours très mignons...

[DMA] "Montre-moi ces autres vies que je ne sais pas"

[DMA] "Montre-moi ces autres vies que je ne sais pas"

— Je vous aurai prévenue, Mme Berry. Faudra pas venir vous plaindre si le petit Malzac pervertit vos enfants ! »

J'aurais embrassé Mme Berry pour avoir pris ainsi ma défense. Enfant, j'avais toujours connu l'humiliation de ne pas être né dans la famille qu'il fallait. D'être toujours celui que l'on soupçonnait dès que quelque chose disparaissait. D'entendre toujours critiquer les membres de ma famille qui faisaient pourtant tout ce qu'ils pouvaient pour boucler les fins de mois. De me voir toujours prédire  que je finirais comme mon père telle la mauvaise graine que j'étais. J'avoue qu'il m'arrivait d'avoir honte de ma famille. Et j'avais honte d'avoir honte.

Parfois, je m'imaginais que j'étais un enfant abandonné, recueilli par les Malzac, et que mes vrais parents, de riches bourgeois, finiraient par me retrouver après des années de recherche, pour m'extirper de toute cette misère.

Mais ce n'était qu'un rêve idiot ! Car la misère a continué à me coller à la peau...

 

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Quelques jours plus tard, je croisai Mme Yamamoto dans la rue. Les mots dénigrants qu'elle avait eus à mon encontre me remplissaient encore de rage. Donc, puisqu'elle avait décidé que j'étais un vicelard, j'allais lui donner ce qu'elle voulait, à cette foutue rombière. Je me postai devant elle, glissai mes mains sous l'élastique de mon jogging et commençai à le baisser sur mon bassin, tout en lui adressant un sourire provocateur :

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« Dis, voisine, tu veux voir ma bite ? »

Elle poussa des cris horrifiés.

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« Petit vaurien, je vais le dire à ta mère !

— Ma daronne, elle est trop occupée à astiquer le manche de ton bonhomme pour t'écouter ! »

Mme Yamamoto devint toute rouge, au bord de l'apoplexie, puis fit le geste de m'attraper, mais je m'enfuis en riant non sans avoir pris le temps de lui adresser un doigt d'honneur.

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Pour de vrai, je n'avais rien compris aux mots que je lui avais crachés au visage, je les avais entendus un soir dans la bouche d'un copain de mon grand frère qui parlait, d'après ce que j'avais compris, d'une fille de leur classe. Ça les avait fait rire tous les deux et ils avaient surenchéri sans que je comprenne davantage de quoi ils parlaient. Je me doutais qu'ils étaient en train de discuter de sexe et j'avais eu peur que Logan ne se mette à raconter ce que faisait parfois notre mère pour remplir le frigo ou payer les factures. Cette chose que j'avais surprise par accident et qui polluait désormais mon cerveau...
Ah, comme je regrettais de n'être pas sorti de ma cachette quand ma mère m'avait appelé en rentrant à la maison avec un inconnu ! Me croyant absent, ma mère avait commencé par roucouler auprès de l'homme, qui la touchait un peu trop à mon goût. J'avais d'ailleurs failli surgir de ma cachette pour lui sauter dessus mais il avait fait agenouiller ma mère face à lui, avait dézippé sa braguette et...

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[DMA] "Montre-moi ces autres vies que je ne sais pas"

Je crois que je n'arriverai jamais à m'extirper ces images de ma tête, même après toutes ces années ! Je suis resté des heures recroquevillé dans ma cachette, longtemps après que l'homme eut déposé de l'argent sur la table et soit parti.

[DMA] "Montre-moi ces autres vies que je ne sais pas"

Ensuite, je n'ai osé en parler à personne. Pas même à mon grand frère qui savait pourtant consoler mes chagrins d'enfant.

J'ai encore gardé le silence quand une dame envoyée par la maîtresse est venue chez nous pour me poser des questions sur le dessin dégoûtant que j'avais fait en classe (Mme Yamamoto n'avait pas menti !) et qui représentait malhabilement cette fameuse scène entre ma daronne et l'étranger ; j'ai inventé une histoire pour protéger ma mère que j'aimais plus que tout et qui trimait tellement pour que nous ne crevions pas de faim.

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[DMA] "Montre-moi ces autres vies que je ne sais pas"

J'ai compris à ce moment-là que je ne pourrai plus jamais faire confiance à mon institutrice ! Elle qui paraissait pourtant si gentille...

 

Non. La seule personne, en dehors de ma famille, en qui j'avais confiance, était Arden. Il habitait une immense maison sur les Hauts de Yuma avec une grande piscine à l'arrière. J'adorais quand il m'invitait à passer la journée chez lui, et parfois à dormir. Mme Berry lançait une machine après que je me sois couché et le lendemain, mes vêtements sentaient bon la lavande.

[DMA] "Montre-moi ces autres vies que je ne sais pas"

Chez les parents d'Arden, tout était beau et propre.

Quand nous revenions de l'école, il y avait toujours quelque chose à manger dans le frigo. Je me régalais avec les bons petits plats de Mme Berry.

[DMA] "Montre-moi ces autres vies que je ne sais pas"

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« Elle cuisine drôlement bien ta mère !

— Ah bon, tu trouves ? S'étonnait Arden qui n'avait jamais goûté à la cuisine de la mienne.

— Oui ! Je me régale ! Ma daronne est tout l'temps schlass, et souvent elle oublie de nous faire à manger à mes frères et moi ! Alors des fois, on s'incruste chez la voisine ! »

Pas la voisine Yamamoto, hein, mais la voisine gentille et serviable ! Mais ça, vous l'aviez bien compris !

 

[DMA] "Montre-moi ces autres vies que je ne sais pas"

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[DMA] "Montre-moi ces autres vies que je ne sais pas"

Chez mon ami, je m'efforçais de paraître normal pour ne pas l'effrayer ni lui montrer combien j'étais taré avec ces images dégoûtantes dans ma tête. Il avait toujours pris ma défense, su imposer ma présence dans les jeux avec les autres élèves qui se plaignaient que je sentais mauvais.

Je n'avais jamais vraiment fait attention à mon odeur. L'eau était régulièrement coupée chez moi et je prenais une douche quand je pouvais.

Ce qu'il y a de terrible avec la pauvreté, c'est qu'elle est non seulement visible au premier coup d’œil (j'avais honte des vêtements que je portais, moches et informes), mais qu'elle dégage aussi un fumet qui dérange l'odorat délicat des autres. Mon linge, qui avait séché dans des endroits enfermés ou été rangé dans des armoires humides, ne sentait pas très bon. Moi-même, je dégageais parfois des odeurs de corps mal lavé. Mais je n'y pouvais pas grand chose.

Je devais perpétuellement supporter le regard soit plein de mépris, soit plein de pitié des autres, et croyez-moi, c'est terriblement humiliant à vivre ! La plupart du temps, on a l'impression de n'être qu'un déchet de la société que les autres supportent faute de ne pouvoir faire autrement.

 

[DMA] "Montre-moi ces autres vies que je ne sais pas"

Avec Arden, j'avais vraiment l'impression d'être normal, et pas cette mauvaise graine en devenir surveillée par tout le monde.

Et pourtant... Mme Yamamoto avait raison. J'avais bel et bien le vice dans le sang. Sinon, il ne me serait pas arrivé toutes ces choses inavouables qui auraient dû me faire horreur mais que j'ai recherchées pour la plupart...

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